Après la démission de Michel Barnier le 5 décembre, suite à un vote de censure historique, Macron a jeté son dévolu sur le leader centriste, lui confiant la lourde tâche de gouverner un pays divisé. La tâche ne sera pas facile pour Bayrou, se disent la plupart des Français.

Les premières intentions du nouveau chef de Matignon

Dès sa nomination, François Bayrou, maire de Pau et ancien allié de Macron depuis 2017, a appelé à une réconciliation nationale. « Tout le monde mesure la difficulté de la tâche et qu’il y a un chemin à trouver. La réconciliation est nécessaire », a-t-il déclaré. Mais cette réconciliation, aussi nécessaire soit-elle, semble difficile à réaliser. Le Parti socialiste, par exemple, a déjà annoncé qu'il ne participerait pas au gouvernement de François Bayrou. Le PS, tout en manifestant son opposition à un gouvernement d’unité, a néanmoins posé une condition : le Premier ministre devra renoncer à l’usage du 49.3 en échange d’une non-censure.

Les critiques ne se limitent pas aux partis de gauche et d’extrême droite. L’affaire des assistants parlementaires européens du MoDem, pour laquelle François Bayrou est toujours sous enquête judiciaire, pourrait également entacher sa crédibilité.

La composition de ce gouvernement reste incertaine, avec une Assemblée nationale fracturée et sans majorité absolue. En effet, François Bayrou devra jongler avec des forces politiques souvent antagonistes. À droite, le camp des Républicains n’est pas acquis à sa cause. François Bayrou a longtemps été perçu comme un traître par Nicolas Sarkozy après son soutien à François Hollande en 2012. Cette inimitié semble toujours peser sur ses relations avec la droite. De son côté, la députée Constance Le Grip a exprimé son scepticisme : « Il est temps que le président annonce son choix, mais c’est à François Bayrou de faire preuve de méthode et d’écoute pour rassembler », a-t-elle indiqué.

Le Rassemblement national, bien que n’ayant pas annoncé de censure a priori, a tout de même exprimé des réserves. Jordan Bardella, président du RN, a déclaré que son parti « ne censure pas un centriste », mais a prévenu que François Bayrou pourrait être perçu comme un prolongement du macronisme, « menant à l’impasse ». De son côté, Marine Le Pen a souligné que ce gouvernement ne pourrait échapper à une impasse politique si ses priorités demeuraient inchangées.

La pression de l’opposition et des enjeux judiciaires

François Bayrou se trouve également sous pression venant des Insoumis. Ceux-ci ont annoncé qu'ils déposeront une motion de censure, conformément à leur position contre un Premier ministre « non issu du Nouveau Front populaire ». Mathilde Panot, cheffe des députés insoumis, a qualifié cette nomination de « bras d'honneur à la démocratie ». Quant à Marine Tondelier, patronne des écologistes, elle a exprimé son désaveu, soulignant que si le gouvernement maintenait sa politique économique, ses députés n’auraient d’autre choix que de voter la censure.

Les critiques ne se limitent pas aux partis de gauche et d’extrême droite. L’affaire des assistants parlementaires européens du MoDem, pour laquelle François Bayrou est toujours sous enquête judiciaire, pourrait également entacher sa crédibilité. Bien qu’il ait été relaxé en février, le parquet a fait appel de cette décision. Si le procès en appel devait avoir lieu pendant son mandat, cela marquerait une première pour un Premier ministre en exercice. Un défi supplémentaire pour François Bayrou, qui devra prouver sa capacité à gérer une situation politique délicate et éviter tout scandale.

Un pari risqué pour Macron

La nomination de François Bayrou à Matignon survient dans un contexte particulièrement difficile pour Emmanuel Macron. Après la déroute de son camp aux élections européennes et la dissolution de l’Assemblée nationale en juin, le président doit naviguer dans un paysage politique éclaté. La tâche de François Bayrou sera d’autant plus compliquée que le budget 2025 de la France est toujours en suspens, et qu’aucune majorité claire ne semble se dessiner à l’Assemblée nationale.

En dépit de ses échecs passés en politique présidentielle, François Bayrou a réussi à s'imposer comme une figure centrale du camp centriste. Son ascension à Matignon est perçue par certains comme une reconnaissance méritée après des décennies de vie politique. Mais avec l’opposition qui se renforce de toutes parts, sa capacité à maintenir l’unité nationale sera mise à l’épreuve. François Bayrou réussira-t-il à relever ce défi ? Seul le temps nous le dira.

Au lendemain de la censure historique du gouvernement Michel Barnier, Emmanuel Macron a assuré lors d’une allocution télévisée qu’il accomplira son mandat jusqu’en 2027, malgré les appels à sa démission.
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— linfodrome.com (@Linfodrome) December 6, 2024