C'est l’ambassade de Côte d’Ivoire à Abuja qui a donné l’alerte aux autorités ivoiriennes dans un courrier daté du 30 janvier. Selon ce document adressé au ministère ivoirien des Affaires étrangères, dix victimes ont été secourues et rapatriées à Abidjan ce lundi, avec l’appui de la Direction des Ivoiriens de l’extérieur et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Mais de nombreux autres restent en détresse au Nigeria.

Un piège bien ficelé

Le mode opératoire de ce réseau repose sur une promesse trompeuse : un voyage vers l’Europe moyennant une somme variant entre 500 000 et 3 millions de francs CFA. Une fois arrivés au Nigeria, les migrants se retrouvent piégés : leurs documents sont confisqués, ils sont isolés et leurs contacts avec l’extérieur sont coupés.

Difficile d’établir le nombre exact de victimes encore retenues au Nigeria, mais la diplomatie ivoirienne estime que plusieurs de ses ressortissants y sont toujours bloqués, livrés à eux-mêmes.

Collaboration

Contactée ce mardi par Linfodrome, une source au ministère ivoirien des Affaires étrangères a confirmé le rapatriement des dix victimes et indiqué que d'autres opérations de rapatriement sont prévues.

Les autorités ivoiriennes affirment travailler « main dans la main » avec leurs homologues nigérians pour identifier et démanteler les auteurs de cette escroquerie. Des enquêtes sont en cours, bien qu'aucune arrestation n’ait encore eu lieu, ni en Côte d’Ivoire ni au Nigeria.

Si le ministère reste discret sur la présence de complices en Côte d'Ivoire, il est évident que des relais locaux facilitent ces départs frauduleux, en servant d’intermédiaires entre les recruteurs et les migrants.

L’ambassade de Côte d’Ivoire au Nigeria assure poursuivre la surveillance de la situation et soutenir les démarches de rapatriement.

Un phénomène migratoire inquiétant

Cette affaire s’inscrit dans une dynamique plus large de migration irrégulière. Selon les chiffres de l’OIM Côte d’Ivoire (2022-2025), les Ivoiriens figurent parmi les principales nationalités arrivant illégalement en Europe depuis 2019. Entre janvier et mars 2023, plus de 5 123 Ivoiriens ont débarqué sur les côtes italiennes, marquant une hausse de 123 % par rapport à 2021.

Les retours volontaires organisés par l’OIM ont concerné 3 162 Ivoiriens entre janvier 2022 et juin 2023, en provenance principalement de Tunisie (34 %), du Maroc (31 %) et du Niger (21 %).

Les raisons du départ sont avant tout économiques : 94 % des migrants ivoiriens interrogés affirment avoir quitté leur pays pour chercher du travail et une meilleure vie. Mais une fois sur le terrain, 41 % disent manquer de moyens pour survivre, 13 % dénoncent la discrimination et 12 % font état des nombreuses difficultés rencontrées en chemin.