A peine 35 jours de sevrage, la machine tourne déjà au ralenti. Mettant en cendres des années de progrès contre le VIH, la tuberculose et le paludisme, Mme Takalea Gisèle, vice-présidente explique le désarroi des faîtières Ivoiriennes suite à l’arrêt brutal, depuis janvier 2025, des fonds du PEPFAR, de l’USAID et du CDC, qui financent 50 à 60 % des services de santé pour les personnes vivant avec le VIH (PVVIH). 

Des ruptures de stocks et des examens vitaux interrompus

Une étude menée par la Plateforme dans 72 structures sanitaires (94 % des régions du pays) révèle une situation très critique. 10,2 % des sites soutenus par le PEPFAR signalent des ruptures de stocks d’antirétroviraux (ARV), contre 7,7 % pour les autres financeurs. « Ces médicaments sauvent des vies. Sans eux, des milliers de patients risquent de développer des résistances ou de mourir », insiste Mme Takalea Gisèle. 

Pire. 11,9 % des sites ont interrompu les tests de charge virale et CD4, essentiels pour adapter les traitements. Dans les régions d’Abidjan 2, de l’Ouest et du Nord-Ouest, 6 638 charges virales n’ont pas été réalisées, et 1 429 patients n’ont pas pu renouveler leurs ARV. 

Les populations vulnérables ( travailleuses du sexe, LGBTQ+, usagers de drogues) sont les premières touchées. Seuls 61 % des sites PEPFAR continuent de les prendre en charge, contre 76,9 % pour les autres financements. « Ces personnes fuient déjà les centres de santé par peur de la stigmatisation. Sans acteurs communautaires pour les accompagner, elles disparaissent des radars », alerte la Plateforme. 

Acteurs communautaires : Le pilier invisible en danger

« Ils sont les héros de l’ombre », rappelle Mme Takalea Gisèle. Les organisations communautaires assurent dépistage, distribution de préservatifs, soutien psychologique et réinsertion socio-économique des PVVIH. Mais avec le gel des fonds, leurs activités sont paralysées. « Sans eux, le système de santé s’effondre », martèle-t-elle. Si les traitements pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans continuent, la Plateforme redoute un effet domino. « Les structures sont déjà surchargées. Une crise du VIH aggraverait tout le système », prévient le rapport. 

Dans les 72 heures, il faut inévitablement un plan d’urgence pour sécuriser les ARV et financer les acteurs communautaires.  Dans les 30 jours, il faudrait augmenter le budget santé à 15 % du budget national (Protocole d’Abuja) et mobiliser 86 USD par habitant. « Le gouvernement doit agir maintenant. Chaque minute compte », implore Mme Takalea Gisèle. Une réunion d’urgence avec l’État, les bailleurs et le secteur privé est réclamée pour éviter une catastrophe. 

Avec 91,6 % des PVVIH dépendants des fonds américains, la Côte d’Ivoire est au bord du précipice. « Nous avons les solutions, mais sans argent et sans volonté politique, des vies seront perdues », conclut la vice-présidente de la Plateforme. La balle est désormais dans le camp des autorités ivoiriennes et américaines. 

🔴 INFO #JT20h : des ONG françaises vont être privées de crédits américains à cause de la disparition de l’USAID, décidée par Donald Trump.

Pour Action contre la Faim, ce sont 120 millions d’euros qui s’envolent pour 2025, soit un tiers de son budget. pic.twitter.com/bq5oIO3ybZ

— franceinfo (@franceinfo) February 11, 2025