Par une lettre adressée à chacun d’eux, le président sud-africain Thabo Mbeki, a convoqué, il y a une dizaine de jours à Pretoria, les ‘’4 têtes fortes’’ dont dépend la sortie de crise en Côte d’Ivoire. Tous ont donné leur accord pour effectuer le déplacement de Pretoria. Alassane Ouattara du Rdr, Henri Konan Bédié du Pdci, Soro Guillaume pour le compte de la rébellion et le chef de l’État, Laurent Gbagbo vont donc se retrouver en Afrique du sud à l’initiative du médiateur Thabo Mbeki.

Appelé comme une sorte d’ultime recours pour trouver une issue à l’impasse ivoirienne, le président sud-africain jouit d’un capital de sympathie de la part des différents protagonistes de la crise ivoirienne, dont chacun fonde un certain espoir en sa médiation. Aussi consensent-ils à répondre à sa convocation en se rendant à Pretoria. Rendez-vous capital, cette rencontre des “4 grands” est à double tranchant.

Crise ivoirienne
La lettre de Thabo Mbéki aux signataires de l’Accord de Pretoria Avril 2005 pic.twitter.com/LxXPHAJZcU

— com fpi (@kom_fpi) August 15, 2015

D’abord, c’est la première fois depuis qu’a démarré le ballet diplomatique sur la crise ivoirienne, que Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié, Soro Guillaume et Laurent Gbagbo vont s’asseoir autour d’une même table pour discuter des voies et moyens pour mettre fin à la tragédie que vit leur pays. En effet, de Lomé à Alexandrie en passant par Kéber, Accra I, II et III et même Librevillle, jamais ces quatre acteurs essentiels du drame ivoirien n’ont eu l’occasion de se parler droit dans les yeux en vue d’aplanir leurs différends.

Quoique Soro, Bédié, Ado et Gbagbo aient participé à la rencontre d’Accra III, c’est la toute première fois qu’ils pourront certainement discuter, presque sans intermédiaire, de ce qui les oppose. C’est en cela que ce rendez-vous de Pretoria apparaît comme celui de la vérité entre Gbagbo et Alassane Ouattara notamment. 

Dernière chance

De fait, cette rencontre ‘’de la dernière chance’’ sera essentiellement consacrée, selon le Rdr cité par l’Aip, aux prochaines élections générales avec en point de mire les conditions exigées pour les candidatures à ce scrutin. Pour une fois, Gbagbo et Ado auront l’occasion de s’expliquer sur le pacte que constitue l’article 35 relatif aux conditions d’éligibilité à la présidence de la République.

 Déterminé à prendre part à l’élection présidentielle cette année, Alassane Ouattara s’est déjà prononcé en faveur de la promulgation de la mouture de l’article 35 telle que proposée à Marcoussis et votée par les députés. Laquelle, selon certains observateurs, devrait lui permettre d’être de la partie le moment venu.

Mais Laurent Gbagbo, qui l’a toujours accusé de lui faire la guerre, est quant à lui arc-bouté à l’option référendaire pour traiter la question, espérant secrètement que Ouattara sera écarté de la course au Palais du Plateau. Ce sont du reste ces deux positions antagonistes qui retardent le désarmement des rebelles, lesquels subordonnent le dépôt des armes à la résolution des questions primordiales comme l’article 35.

Gbagbo et ADO ont donc l’occasion rêvée de trouver un modus vivendi qui permette d’élucider cette question et ouvrir ainsi la porte à la tenue des élections générales à venir. Et c’est là le deuxième enjeu de cette rencontre de Pretoria. À quelques jours de son voyage en Afrique du sud, le président Laurent Gbagbo a encore réaffirmé sa volonté de voir les élections se tenir en octobre prochain.

À cet effet, il a enjoint le Premier ministre Seydou Diarra et son équipe de s’atteler, toutes affaires cessantes, au désarmement ou à la préparation de ce scrutin. Mais Laurent Gbagbo n'ignore pas que la tenue des élections dépend étroitement du désarmement, lequel coince parce que Soro Guillaume et son armée n'ont pas encore l'assurance qu'Alassane Ouattara sera candidat.

Si donc l'on veut que les élections aient lieu en octobre, Pretoria se présente comme une opportunité qu'il devra saisir pour discuter avec Soro et surtout Ouattara du prix à payer pour lever les hypothèques qui pèsent sur les élections générales que les Ivoiriens et la communauté internationale appellent de tous leurs vœux. 

Assane MADA 

L'Inter, 26 mars 2005